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V


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Vois ces monts éternels, le Temps les désagrège ;
Cultivés à leurs pieds, boisés à leur milieu,
Plus haut couverts de prés, enfin dans le ciel bleu
Couronnés fièrement d’étincelante neige,

Ils dressent leur sommet jusqu’au divin cortège
Des étoiles ; le ciel les pénètre d’un feu
Qui ternit tous les feux terrestres, et vers Dieu
Ils montent par élans que la lumière allège.

Ils croulent cependant, ils roulent dans la plaine,
Ils seront les vaincus d’une incessante lutte,
Il n’est pas un rayon, pas un gel, une haleine,

Qui n’arrache leurs rocs minute par minute,
Leurs flancs profonds sont pleins des échos de leur chute ;
Ils mourront à leur tour comme meurt la phalène.