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III


1

 
Si nos cœurs en avaient l’égoïste courage,
Nous pourrions fuir ensemble, et cacher notre amour,
Parmi les monts neigeux, on sur un chaud rivage
Qui ceint les flots d’azur de son calme contour ;

Il nous serait aisé, perdus dans un vieux bourg
Bâti au bord d’un lac en un nid de feuillage,
Ou dans le brun hameau de quelque claire plage,
De faire à notre exil un paisible séjour.

Là je pourrais enfin, tous mes vœux exaucés,
Te voir, te posséder, te garder, t’adorer,
Vivre dans ton regard, ton sourire, et tes bras,

Sentir sous ce bonheur nos chagrins effacés,
Et, comme un voyageur brûlant, désaltérer
Cette âpre soif de loi qui brûle mon cœur las.