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V


Nous allons tous les jours à la petite baie,
Parmi ses sables plats, dans son cirque de dunes ;
Tantôt elle s’emplit d’eau vigoureuse et gaie,
Quand les vents et les flots déposent leurs rancunes ;

Tantôt, sous leur colère, elle tremble et s’effraie ;
Et tantôt elle est vide, et ses longues lagunes
Sont pleines, sous le ciel que la brise balaie,
De lourds soleils sanglants ou de tremblantes lunes ;

Quelquefois, mais plus tôt, ses franges d’algues vertes,
Par la mer qui descend récemment découvertes,
Luisent avec douceur sous des rayons obliques ;

Et parfois des brouillards traînant à sa surface
En font un monde étrange aux lumières mystiques,
Un rêve pâle où tout se dissout et s’efface.