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comme d’eux-mêmes sur la langue, ou dans une piece de boucherie bien choisie & bien mortifiée ? Ne s’est il jamais trouvé à d’assez bonnes tables, pour sçavoir que la viande n’est point si coriasse qu’il le dit ? Au regard de la facilité à se corrompre, qu’entend-il par-là ? Ou il prétend dire que la viande ne peut être gardée long-tems sans se gâter ; ou il veut faire entendre que lorsqu’elle est dans l’estomac, elle s’y corrompt aisément, au lieu de s’y digerer. S’il veut dire qu’elle ne se garde pas long-tems, il doit sçavoir que le poisson se garde encore moins[1] : d’ailleurs, la facilité que peut avoir un aliment à se corrompre, quand il est naturellement d’une espece à cela, ne le rend ni moins sain, ni moins nourrissant, pourvû qu’on ne lui laisse pas le tems de se gâter. C’est la reflexion que fait le sçavant Pisanelli, en recommandant l’usage de la carpe : elle se corrompt promptement, dit-il, mais il n’y a qu’à la faire cuire au plûtôt : Nullâ damni infamiâ laborat, præterquam quod citò computrescat, quamprimùm itaque coquendus est[2].

Il n’y a point d’aliment plus susce-

  1. Asservati pisces semper damnantur, quia nihil tam citò corrumpitur. Petrus Gontier, lib. 2. de piscib. cap. 2.
  2. Pisanell. de Escul. & Potul. Facult.