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LES NOCES CHYMIQUES

suspendu un grand et précieux diadème. Ils n’étaient pas aussi beaux à ce moment que je me l’imaginais, mais ce n’était pas sans raison.

Plusieurs hommes, des vieillards pour la plupart, avaient pris place derrière eux sur un banc circulaire. Or, chose surprenante, aucun d’eux ne portait d’épée ni d’autre arme ; en outre je ne vis point de garde du corps, sinon quelques vierges qui avaient été parmi nous hier et qui s’étaient placées le long des deux bas-côtés aboutissant à l’hémicycle.

Je ne puis omettre ceci : Le petit Cupidon y voletait. La grande couronne exerçait un attrait particulier sur lui ; on l’y voyait voltiger et tournoyer de préférence. Parfois il s’installait entre les deux amants, en leur montrant son arc en souriant ; quelquefois même il faisait le geste de vous viser avec cet arc ; enfin ce petit dieu était si malicieux qu’il ne ménageait même pas les petits oiseaux qui volaient nombreux dans la salle, mais il les tourmentait chaque fois qu’il le pouvait. Il faisait la joie et la distraction des vierges ; quand elles pouvaient le saisir il ne s’échappait pas sans peine. Ainsi toute réjouissance et tout plaisir venaient de cet enfant.

Devant la Reine se trouvait un autel de dimensions restreintes mais d’une beauté incomparable ; sur cet autel un livre couvert de velours noir rehaussé de quelques ornements en or très simples ; à côté une petite lumière dans un flambeau d’ivoire. Cette lumière quoique toute petite brûlait, sans s’éteindre jamais, d’une flamme tellement immobile que nous ne l’eussions point reconnu pour un feu si l’espiègle Cupidon n’avait soufflé dessus de temps en temps. Près du flambeau se trouvait une sphère céleste, tournant autour de son axe ; puis une petite horloge à sonnerie près d’une minuscule fontaine en cristal, d’où coulait à jet continu une eau limpide couleur rouge sang. À côté, une tête de mort, refuge d’un serpent blanc, tellement long que malgré qu’il fit le tour