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LES NOCES CHYMIQUES

plus souvent vers le ciel que vers la terre. Nous crûmes qu’elle était la fiancée ; en cela nous étions loin de la vérité ; cependant elle était plus noble que la fiancée par les honneurs, la richesse et le rang. Ce fut elle qui, maintes fois, régla le cours entier des noces. Nous imitâmes notre vierge et nous nous prosternâmes au pied de cette reine malgré qu’elle se montrât très humble et pieuse, Elle tendit la main à chacun de nous tout en nous disant de ne point trop nous étonner de cette faveur car ce n’était-là qu’un de ses moindres dons. Elle nous exhorta à lever nos yeux vers notre Créateur, à reconnaître sa toute-puissance en tout ceci, à persévérer dans la voie où nous nous étions engagés et à employer ces dons à la gloire de Dieu et pour le bien des hommes. Ces paroles, si différentes de celles de notre vierge, encore un peu plus mondaine, m’allaient droit au cœur. Puis s’adressant à moi : « Toi, » dit-elle, « tu as reçu plus que les autres, tâche donc de donner plus également ».

Ce sermon nous surprit beaucoup, car en voyant les vierges et les musiciens nous avions cru qu’on allait danser.

Cependant les poids dont nous parlions plus haut étaient encore à leur place ; la reine — j’ignore qui elle était — invita chaque vierge à prendre l’un des poids, puis elle donna le sien qui était le dernier et le plus lourd à notre vierge et nous ordonna de nous mettre à leur suite. C’est ainsi que notre gloire majestueuse se trouva un peu rabaissée ; car je m’aperçus facilement que notre vierge n’avait été que trop bonne pour nous et que nous n’inspirions point une si haute estime que nous commencions presque à nous l’imaginer.

Nous suivîmes donc en ordre et l’on nous conduisit dans une première salle. Là, notre vierge suspendit le poids de la reine le premier, tandis qu’on chanta un beau cantique. Dans cette salle, il n’y avait de précieux que quelques beaux livres de prières qu’il nous était impos-