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DEUXIÈME JOUR

sédait pas une qui l’égalât. À côté de la porte se dressaient deux colonnes ; l’une d’elles portait une statue souriante, avec l’inscription : Congratulateur[1] ; sur l’autre la statue cachait sa figure tristement et au-dessous on lisait : Je compatis[2]. En un mot, on voyait des sentences et des images tellement obscures et mystérieuses que les plus sages de la terre n’eussent pu les expliquer ; mais, pourvu que Dieu le permette, je les décrirai tous sous peu et je les expliquerai.

En passant sous la porte il m’avait fallu dire mon nom, qui fut inscrit le dernier sur le parchemin destiné au futur époux. Alors seulement le véritable insigne de convive me fut donné ; il était un peu plus petit que les autres mais beaucoup plus pesant. Les trois lettres suivantes y étaient gravées : S. P. N.[3]; ensuite on me chaussa d’une paire de souliers neufs, car le sol entier du château était dallé de marbre clair. Comme il m’était loisible de donner mes vieux souliers à l’un des pauvres qui s’asseyaient fréquemment mais très décemment sous la porte, j’en fis présent à un vieillard.

Quelques instants après, deux pages tenant des flambeaux, me conduisirent dans une chambrette et me prièrent de me reposer sur un banc ; ce que je fis, tandis qu’ils disposaient les flambeaux dans deux trous pratiqués dans le sol ; puis ils s’en allèrent, me laissant seul.

Tout à coup, j’entendis près de moi un bruit sans cause apparente et voici que je me sentis saisi par plusieurs hommes à la fois ; ne les voyant pas je fus bien obligé de les laisser agir à leur gré. Je ne tardai pas à m’apercevoir qu’ils étaient perruquiers ; je les priai alors de ne plus me secouer ainsi et je déclarai que je me prêterais à tout ce qu’ils voudraient. Ils me rendirent aussitôt la liberté de

  1. Congratulor.
  2. Condoleo.
  3. Salus per naturam ; Sponsi præsentandus nuptiis : Santé par la nature ; offert aux noces du fiancé.