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SEPTIÈME JOUR

retirés dans le cabinet ; puis chacun y fut appelé pour y formuler son souhait, de sorte que j’ignore les vœux de mes compagnons.

En ce qui me concerne, je pensais qu’il n’y aurait rien de plus louable que de faire honneur à mon Ordre en faisant preuve d’une vertu ; il me semblait aussi qu’aucune ne fut jamais plus glorieuse que la reconnaissance. Malgré que j’eusse pu souhaiter quelque chose de plus agréable, je me surmontai donc et je résolus de délivrer mon bienfaiteur, le gardien, fût-ce à mon péril. Or, quand je fus entré, on me demanda d’abord si je n’avais pas reconnu ou soupçonné le malfaiteur, étant donné que j’avais lu la supplique. Alors, sans nulle crainte, je fis le récit détaillé des événements et comment j’avais péché par ignorance ; je me déclarai prêt à subir la peine que j’avais méritée ainsi.

Le Roi et les autres seigneurs furent très étonnés de cette confession inattendue ; ils me prièrent de me retirer un instant. Dès que l’on m’eut rappelé, Atlas m’informa que Sa Majesté Royale était très peinée de me voir dans cette infortune, moi, qu’Elle aimait par-dessus tous ; mais qu’il Lui était impossible de transgresser Sa vieille coutume et Elle ne voyait donc d’autre solution que de délivrer le gardien et de me transmettre sa charge, tout en désirant qu’un autre fût bientôt pris afin que je pusse rentrer. Cependant on ne pouvait espérer aucune délivrance avant les fêtes nuptiales de son fils à venir.

Accablé par cette sentence, je maudissais ma bouche bavarde de n’avoir pu taire ces événements ; enfin, je parvins à ressaisir mon courage et, résigné à l’inévitable, je relatai comment ce gardien m’avait donné un insigne et recommandé au gardien suivant ; que, grâce à leur aide, j’avais pu subir l’épreuve de la balance et participer ainsi à tous les honneurs et à toutes les joies ; qu’il avait donc été juste de me montrer reconnaissant envers mon bienfaiteur et que je les remerciais pour la sentence, puisqu’elle