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LES NOCES CHYMIQUES

que c’était la preuve que Dieu m’avait destiné à un bonheur particulier.

Tout en cheminant nous arrivâmes au premier portail ; alors le gardien vêtu de bleu se présenta. Dès qu’il me vit près du Roi il me tendit une supplique et me pria respectueusement de me souvenir de l’amitié qu’il m’avait témoignée, maintenant que j’étais auprès du Roi. Je questionnai d’abord le Roi au sujet de ce gardien ; il me répondit amicalement que c’était un astrologue célèbre et éminent qui avait toujours été en haute considération auprès du Seigneur son père. Or il était advenu que le gardien avait agi contre dame Vénus, l’ayant surprise et contemplée dans son lit de repos ; pour sa punition il avait été détaché comme gardien à la première porte jusqu’à ce que quelqu’un le délivrât. Je demandai si cela pouvait se faire et le Roi répondit :

« Oui ; si l’on découvre quelqu’un qui ait commis un péché aussi grand que le sien, il sera placé comme gardien à la porte et l’autre sera délivré ».

Ces mots me troublèrent profondément, car ma conscience me montra bien que j’étais moi-même ce malfaiteur ; cependant je me tus et je transmis la supplique. Dès que le Roi en eut pris connaissance il eut un mouvement d’effroi tellement violent que la Reine qui chevauchait derrière nous en compagnie de ses vierges et de l’autre reine — que nous avions vue lors de la suspension des poids, — s’en aperçut et le questionna sur cette lettre. Il ne voulut rien dire mais il serra la lettre sur lui et parla d’autre chose jusqu’à ce que nous fussions parvenus dans la cour du château ; ce qui eut lieu à trois heures. Là nous descendîmes de cheval et nous accompagnâmes le Roi dans la salle que j’ai déjà dépeinte.

Aussitôt le Roi se retira avec Atlas dans un cabinet et lui fit lire la supplique. Alors Atlas monta à cheval sans tarder afin de compléter ses renseignements près du gardien. Puis le Roi s’assit sur son trône ; son épouse et d’au-