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COUPE-GORGE


À Rimini, en été.



Quiconque voudra haïr, qu’il vienne à Rimini, quand le vent du Sud souffle d’un ciel étouffé sous les nuages, d’où le soleil plombe comme une poche à fiel : la vésicule trop mûre va crever, à moins qu’elle ne perce sa gaine de graisse, et soudain ne s’en détache. Ce vent est pour me rendre fou ; il est épais, il est solide ; il a un corps de poudre sèche qui pique la peau de mille pointes ardentes. Il brûle ; il me creuse les yeux et me casse la nuque. Les mouches collent à la sueur. Les insectes, par essaims d’ailes blanches, tourbillonnent sur le front, aux oreilles, au creux de la main, dans les narines. Je tremble de rage à l’idée d’en avoir dans la bouche. Il fait une chaleur à mettre le feu aux barques, sur le sable ; et le sable bout : il vole.

Le soleil blanc fond dans le ciel jaune. Il coule sur le gril des nuées jaunes et noires, pareilles à l’arête des soles. Les arbres haletants sont malades de poussière ; couverts de cette