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BEAUTÉS DE LA REINE


À Venise, en été.



Dans Campanile, il n’est point de Venise. Le clou d’or roux du clocher en aiguille, lui seul, fixe la sirène changeante. Il pique l’heure pour la folle oublieuse. Dès l’aube, il rive la flottante Venise au matin bleu ; et le soir, le Campanile est le mât de brocart rose et d’or à la barque amarrée pour Vénus, sur la lagune.

De là-haut, la forme de Venise était parlante. Comme une main gantée, et l’Arsenal est au poignet, la puissante main de l’Orient sur l’eau prend possession de la terre ; elle bénit la bête couchée qu’elle tient, le chien de l’Ouest à genoux ; et entre deux, le beau serpent de la volupté, la guivre d’azur, le Grand Canal ondule.

Dans le premier feu du désir, on ne reproche rien à la femme qu’on aime. On ne juge point Venise : on la caresse, on la