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xxv

LA VILLE DU BŒUF


À Padoue, en été.



L’été, j’aime arriver dans une ville inconnue, deux ou trois heures avant la fin du jour. Alors, la plus charnelle a sa poésie : elle est parée de lumière, et dans sa grâce épanouie, elle semble la fleur de son propre génie.

À l’heure où la terre est une Danaé qui reçoit la pluie d’or, largement accroupie sur la plaine, Padoue jaune et noire, est une tête de bœuf bien cuite dans un pâté en croûte. De la gare à la ville, on fait route longtemps ; la marche est dure sur la terre battue, comme à travers les sillons ; des ornières roides et des trous rident la planure chaude. L’air poudroie dans le soleil, et le soleil poudroie sur les remparts trapus. Une poussière dorée vibre sous le ciel rose.

Lentement, des ouvriers se croisent sur le chemin blanc, la veste pendue au coude. Des enfants aux couleurs violentes se