Page:Andreïev - Nouvelles, 1908.djvu/97

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
87
LE GOUVERNEUR

sonniers. C’était en automne et les nuages passaient très bas au-dessus des champs couverts de chaume. Et ils étaient tous allés en ville, vers la lumière, laissant la campagne sous le ciel bas, avec ses champs sombres, argileux et bosselés, au chaume rare et court.

— Les petits enfants sont tous morts. Les petits enfants, les petits enfants sont tous morts, tous…

Le son joyeux et vif du gong annonçant le déjeuner, se répercutait dans le parc. Le gouverneur revint rapidement sur ses pas, en regardant sa montre d’un air sévère : il était midi moins dix. Il remit la montre dans son gousset et s’arrêta.

— C’est honteux ! dit-il d’une voix forte et irritée, en faisant une grimace. C’est honteux, je crois bien que je suis un coquin.

Après le déjeuner, il alla dans son cabinet de travail, dépouilla la correspondance arrivée de la ville. Distrait et maussade, il classait les enveloppes, mettant les unes de côté, ouvrant les autres avec des ciseaux et lisant les lettres sans prêter aucune attention à leur contenu. Une mis-