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LE GOUVERNEUR
(une page de la révolution russe)

I

Quinze jours déjà s’étaient écoulés depuis l’événement, et sa pensée y revenait sans cesse, comme si le temps lui-même s’était arrêté, telle une horloge détraquée, et fût resté sans effet sur sa mémoire. Quand il se mettait à réfléchir à des faits lointains, étrangers, sa pensée effrayée retournait en quelques secondes à l’évènement et se débattait, comme si elle eût heurté une haute muraille de prison, sourde et sans écho. Quelles voies bizarres elle prenait, cette pensée ! Evoquai-t-il son voyage en Italie, plein de soleil, de jeunesse et de chansons, revoyait-il l’image d’un lazarone quelconque, immédiatement se