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NOUVELLES

avait envie de partir, mais il ne savait comment s’y prendre pour ne pas faire de la peine au petit garçon ; il reniflait, glissant de sa chaise et s’y rasseyant avec énergie, comme pour toujours. Il serait resté volontiers s’il avait su de quoi parler, mais les thèmes de conversation manquaient ; il lui venait des idées baroques, dont il était à la fois amusé et honteux. Ainsi la tentation lui prenait à tout moment d’appeler Sénista par son nom entier : Sénista Eroféiévitch, ce qui était tout à fait idiot, Sénista étant un petit apprenti et Sazonka un ouvrier habile et un grand ivrogne, à qui l’on donnait son petit nom par habitude seulement. Il n’y avait pas plus de quinze jours qu’il avait appliqué sa dernière gifle à Sénista ; c’était très mal, et il était également impossible d’en parler.

Sazonka se mit résolument à glisser de sa chaise ; mais avant d’arriver à la moitié du parcours, il se rassit avec tout autant de décision et déclara :

— Voilà les affaires ! Tu as mal, hein ?

Sénista hocha la tête affirmativement et répondit à mi-voix :