Page:Andreïev - Nouvelles, 1908.djvu/267

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
257
BERGAMOTE ET GARASKA

— Ivan Akindinitch, et cette surprise pour notre gamin ? demanda Marie.

— Après, après ! répond vivement Bergamote. Lui aussi, il se brûle avec la soupe ; il souffle sur la cuillerée et s’essuie les moustaches avec gravité, mais au fond, il est tout aussi étonné que Garaska.

— Mangez ! mangez ! invite Marie. Gérassime… comment s’appelait votre père ?

— André, répond Garaska.

— Alors mangez donc, Gérassime Andréitch[1].

Garaska essaie d’avaler sa bouchée, il étouffe, jette sa cuiller et laisse tomber sa tête sur la table, juste sur une tache de graisse qu’il vient de faire. Le même hurlement plaintif et grossier, qui a tant troublé Bergamote, sort de nouveau de sa poitrine. Les enfants, qui ne faisaient plus attention à l’hôte, jettent aussi leur cuiller et unissent leurs voix aiguës à la sienne. Bergamote regarde sa femme d’un air lamentable et déconcerté.

— Qu’avez-vous donc, Gérassime Andréitch ?

  1. En Russie, on ajoute comme marque de respect le prénom du père à celui de la personne à qui l’on parle.
17