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NOUVELLES

était séparé du sien par le vestibule. Il rentra très tard ; pourtant, Koukouchkine n’était pas encore revenu. La nuit passa, puis la journée suivante. Koukouchkine était toujours absent.

Après avoir glissé la liste du capitaine dans le revers de sa manche, Koukouchkine était sorti. Saisi par le froid intense, il avait instinctivement hâté le pas, oubliant le dandinement habituel qui l’avait fait renvoyer de la compagnie. Il sentait mieux la chaleur de l’alcool qu’il venait de boire, mais sa mauvaise humeur ne se dissipa pas. Il envoya à tous les diables une femme qu’il avait heurtée et qui lui déclara, avec un certain respect, qu’elle n’avait jamais vu un diable aussi long que lui ; puis, il passa à dessein juste devant une haridelle de fiacre et, le cocher l’ayant injurié, il riposta :

— Que Satan vous emporte, sale charretier !

Et tout ce que Koukouchkine rencontra sur sa route n’éveilla en lui que des récriminations et