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vibrait doucement. Parfois, c’étaient des oiseaux qui passaient.

Dans les cellules, cette sonnerie seule arrivait, jour et nuit. Elle pénétrait au travers des épaisses murailles de pierre ; elle seule rompait le silence. Parfois, on l’oubliait, on ne l’entendait pas. Parfois, on l’attendait avec désespoir. On ne vivait que par le son et pour le son, car on avait appris à se défier du silence. La prison était réservée aux criminels de marque ; son règlement spécial, rigoureux, était ferme et rude comme l’angle des murailles. Si les choses cruelles peuvent avoir leur noblesse, il y avait de la noblesse dans ce silence solennel et profond où s’engloutit tout souffle, tout frôlement.

Dans ce silence, que traversait le tintement désolé des minutes qui s’enfuient, trois hommes et deux femmes, séparés du monde, attendaient la venue de la nuit, de l’aurore et du supplice ; et chacun s’y préparait à sa manière.

Pendant toute sa vie, Tania Kovaltchouk n’avait pensé qu’aux autres ; c’était encore