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en roulant ses yeux injectés de sang. S’il faut que je sois pendu, pendez-moi, au lieu de… Ah ! gredins !…

Blanc comme craie, le soldat pleurait d’angoisse et de peur ; il heurtait le canon de son fusil contre la porte et criait d’une voix lamentable :

— Je te fusillerai ! Par Dieu, tu entends ! Je te fusillerai !

Mais il n’osait pas tirer : on ne faisait jamais feu sur des condamnés à mort, sauf en cas de révolte. Et le Tzigane grinçait des dents, jurait et crachait. Son cerveau, placé sur la limite étroite qui sépare la vie de la mort, se fragmentait comme un morceau d’argile desséchée.

Lorsqu’on vint, pendant la nuit, pour le mener au supplice, il se ranima. Ses joues se colorèrent un peu ; dans ses yeux, la ruse habituelle, un peu sauvage, étincela de nouveau, il demanda à un fonctionnaire :

— Qui nous pendra ? Le nouveau ? Il n’en a pas encore l’habitude !

— Vous n’avez pas à vous inquiéter