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contre, on ne la voyait même pas sur lui, tant l’habit était étranger à l’homme. Bien que Werner n’eût été armé que d’un mauvais revolver, alors que les autres portaient des bombes et des machines infernales, les juges le considéraient comme le chef et le traitaient avec un certain respect.

La terreur insupportable de la mort et le désir désespéré de réprimer cette peur, de la dissimuler aux juges, partageaient l’âme de son voisin, Vassili Kachirine. Dès le matin, depuis que les prisonniers avaient été conduits au tribunal, il étouffait sous les battements précipités de son cœur. Des gouttes de sueur apparaissaient sans cesse sur son front ; ses mains étaient également moites et froides ; collée au corps, sa chemise humide et glacée gênait ses mouvements. Par un effort de volonté surhumain, il obligeait ses doigts à ne pas trembler, sa voix à être ferme et mesurée, son regard tranquille. Il ne voyait rien autour de lui ; le bruit des voix lui parvenait comme au travers d’un brouillard, et c’est dans un brouillard aussi