Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/296

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
278
LA VIE D’UN POPE

il le savait déjà : C’était elle ! l’exaltation décisive et suprême, plus forte que la vie et que la mort ! celle qui commande aux montagnes : « Allez ! » et les vieilles montagnes, irritées, commencent à se mouvoir ! Joie ! joie ! joie !

Il embrasse d’un coup d’œil le cercueil, l’église, la foule, et comprend !… il comprend tout ! il a cette intuition merveilleuse et spéciale aux rêves, cette divination qui fait pénétrer jusque dans la profondeur des choses, et s’évanouit sans retour aux premières lueurs du matin ! C’est elle ! La voici ! Joie ! joie ! joie !

Il éclate d’un rire enroué, entrevoit le visage effaré du diacre qui lève le doigt pour l’avertir ; il entrevoit les échines courbées de ceux qui ont entendu son rire et se faufilent vers la porte, comme des vers de terre… Il voit tout cela, et se pince les lèvres comme un écolier pris en faute.

— Je ne le ferai plus ! chuchote-t-il au diacre, mais une extase insensée jaillit comme