Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/274

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
256
LA VIE D’UN POPE

qu’aux pieds de Nikone pâle d’effroi, et s’y arrêta, innocente et candide.

Deux heures après, on parvint à déterrer le cadavre de Sémione.

Sa bouche largement ouverte, aux dents blanches et comme égalisées à la lime, était pleine de sable jusqu’aux lèvres ; et partout, ce beau sable fin poudrait les sourcils blancs, la barbe et la chevelure de feu, tous les replis du visage et les yeux d’une poussière dorée.

Le fils de Mossiaguine, Sionka, était accouru avec les gens du village venus à cheval ; et parce que personne n’avait voulu le prendre en croupe, et qu’il avait dû trotter tout le long de la route derrière les cavaliers, on entendait maintenant sa respiration courte et haletante. Il s’était assis à l’écart sur une motte de terre, tandis qu’on déterrait le cadavre de son père, et ses yeux immobiles n’avaient pas quitté la montagne de sable qui fondait lentement…