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LA VIE D’UN POPE

pris une rigidité singulière et absolue, les plis des couvertures et des draps semblaient maintenant sculptés dans la pierre froide ; les teintes chaudes de la vie semblaient s’être fanées jusque sur les vêtements, et s’être fondues en des couleurs ternes et comme artificielles…

La popadia était morte.

La nuit chaude et moite respirait par la fenêtre entr’ouverte, et, quelque part, au loin, la rumeur monotone des cigales soulignait davantage le silence de la chambre.

Autour de la lampe, des papillons de nuit voletaient sans bruit ; ils tombaient tout à coup, et, de nouveau se ruaient vers le feu à grands coups d’ailes gauches et douloureux : et, tour à tour, ils se perdaient dans l’ombre, ou blanchissaient dans la lumière, comme des flocons de neige.

La popadia était morte.

— Non ! non ! cria tout à coup le pope avec effroi. Je crois, tu as raison ; je crois !

Il tomba à genoux, la face collée au plancher inondé d’eau, jonché de débris d’ouate