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LA VIE D’UN POPE

maison du diacre où l’on avait transporté la popadia à l’agonie.

— Où est-elle ? demanda-t-il, d’un ton ferme, aux assistants qui regardaient, muets.

On la lui montra ; il fit un pas en avant et dut se pencher très bas pour la voir. Alors il aperçut une masse informe, d’où partaient de sourds gémissements ; une énorme ampoule blanche couvrait tout le corps et le visage chéri, si cruellement altéré qu’il eut peine à le reconnaître.

Le père Vassili recula avec épouvante et se cacha la face dans ses mains. La popadia s’agita vaguement. Peut-être avait-elle repris conscience et voulait-elle parler ; mais, au lieu de mots, sa gorge ne laissait passer qu’une sorte de gargouillement rauque et haletant.

Le pope découvrit sa face ; elle n’avait pas de larmes ; même elle était empreinte d’une sorte d’inspiration hautaine, comme la face d’un prophète.

Et quand il se mit à parler, à voix haute et distincte, comme on parle aux sourds, une