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LA VIE D’UN POPE

sont les veaux qui mugissent ainsi. Que puis-je faire, moi ?

Et il se frappait la poitrine de son doigt tendu.

— Que suis-je donc ? Suis-je Dieu, peut-être ? Prie-le ! Allons, prie-le, te dis-je !

Et, donnant une poussée au moujik :

— Mets-toi à genoux !

Mossiaguine s’agenouilla.

— Prie !

Derrière le pénitent, c’était la solitude obscure de l’église ; au-dessus de lui, le pope irrité continuait à crier :

— Prie ! Prie !

Machinalement, il se mit à faire des signes de croix précipités et de grands saluts jusqu’à terre.

Ces inclinations rapides et répétées, l’étrangeté des paroles du pope, la conscience d’être soumis, corps et âme, à une volonté obscure, mais forte, tout cela effrayait Mossiaguine, et, par cela même, le réconfortait singulièrement. Car, de l’effroi même, inspiré par un Dieu puissant et redoutable, naissait l’espoir