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LA VIE D’UN POPE

hommes sentirent qu’une chose affreusement triste les unissait.

D’un mouvement inconscient, ils se penchèrent l’un vers l’autre, et le père Vassili mit sa main sur l’épaule du moujik ; elle reposait là, douce et légère, comme une toile d’araignée en automne. Mossiaguine frémit tendrement de l’épaule, et, levant ses bons yeux confiants, la bouche à demi tordue par un sourire pitoyable, il dit :

— Peut-être que cela ira mieux ?

Le pope retira doucement sa main et garda le silence. Les cils blancs du moujik battirent plus vite ; les poils rouge-feu de sa barbe frémirent, et ses lèvres balbutièrent quelque chose de confus et d’inintelligible.

— … Ainsi, cela n’ira jamais mieux… sûrement, vous dites vrai !…

Mais le pope ne lui permit pas de finir ; il frappa du pied avec colère, enveloppa Mossiaguine d’un regard hostile, et, se penchant jusqu’à le toucher, chuchota dans un sifflement de serpent irrité :

— Ne pleure pas, n’ose pas pleurer ! Ce