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LA VIE D’UN POPE

son visage sans parvenir à le réchauffer ; cependant, comme ses traits n’expriment aucun effroi, la terreur de la popadia se dissipe ; elle colle ses lèvres à l’oreille de son époux et chuchote :

— Pope, dis, pope, tu te rappelles Vassia, l’autre Vassia ?

— Non !

— Alors, pourquoi gémis-tu dans tes rêves ? Pourquoi gémis-tu ?

— Je suis parfois mal à l’aise

La popadia éclate d’un rire irrité :

— Toi, mal à l’aise ?… allons donc ! — Et elle donne du doigt dans la poitrine osseuse, mais large et robuste, du prêtre. — Pourquoi mens-tu ?

Le père Vassili ne répond rien ; la popadia jette un regard hostile sur sa figure froide, sa barbe inculte croissant en broussailles clairsemées sur les joues caves ; elle hausse les épaules d’un air de dégoût.

— Pouah ! comme tu es changé tout de même ! tu es devenu méchant, froid, répugnant comme une grenouille !… Est-ce ma