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LA VIE D’UN POPE

elle souhaitait de pouvoir se briser la tête contre un mur.

Épouvantée, elle courait à la chambre et appelait son mari :

— Vassili ! Vassili ! vite, viens !

Le père Vassili accourait et s’asseyait dans un recoin obscur, aussi indifférent, aussi calme, aussi lointain, que si l’épouvante et la folie n’eussent pas régné dans la maison ; on ne voyait plus ses yeux et, sous le front bombé, se creusaient seulement deux taches noires qui donnaient à son visage émacié l’aspect d’une tête de mort.

Le menton appuyé dans ses deux mains osseuses, il restait là, figé dans un silence, une immobilité absolus, tandis que la popadia, un peu rassurée pourtant, barricadait, avec une hâte folle, la porte donnant accès dans la chambre de l’idiot.

Elle y portait la table et les chaises, y entassait les coussins et les vêtements, mais ce n’était pas assez ; il lui fallait encore ébranler et pousser, avec la force d’un homme, une ancienne et pesante commode, et la traî-