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LA VIE D’UN POPE

elle doutait toujours de son grand bonheur, et croyait l’acheter par toutes ces misères : il lui semblait, que si le porc, bête de prix, était crevé, si Nastia était tombée malade, si d’autres maux encore avaient fondu sur eux, en revanche, jamais personne n’oserait offenser son enfant.

Et, pour ce fils tant désiré, elle aurait donné et la maison et Nastia ; elle aurait donné avec ravissement et sa vie et son âme à la puissance invisible et impitoyable, toujours altérée de nouveaux sacrifices.

Elle avait embelli, elle ne craignait plus Ivan Porphyritch ; en allant à sa place à l’église, elle bombait fièrement son ventre arrondi et jetait sur les gens des regards hardis et assurés.

Pour ne pas risquer de nuire à l’enfant, elle cessa de vaquer aux pénibles travaux du ménage, et passa toutes ses journées dans la forêt domaniale.

Là, dans la haute futaie toute chaude de l’été déclinant, toute sombre et pleine de parfums, sous la voûte impénétrable des