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LA VIE D’UN POPE

époux : tantôt elle le suppliait humblement, tantôt elle minaudait et se faisait provocante. Mais l’effroi ne quittait pas le visage assombri du prêtre.

Alors, douloureusement, elle s’efforça de redevenir la créature tendre et désirable qu’elle était il y a dix ans : elle prit un visage timide et virginal, et murmura de petites phrases naïves de fillette ; mais ses lèvres gonflées par l’alcool ne lui obéissaient pas, et sous les cils baissés brûlait, ardent et significatif, le feu d’un désir insensé… Et cependant le pope, la face abîmée dans ses mains fiévreuses, murmurait faiblement :

— Il ne faut pas ! il ne faut pas !

Alors, elle se jeta à genoux, et d’une voix enrouée l’implora :

— Par pitié ! rends-moi Vassia ! rends-le moi, pope ! rends-le, maudit !

La pluie d’automne fouettait obstinément les volets hermétiquement clos, et seule autour d’eux, la nuit mauvaise respirait, lourde et profonde.

Isolés, dans leur maison, du monde exté-