Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

car j’ai volé aussi des chevaux, mademoiselle. Et avec elle, je serai comme avec un enfant innocent, comprenez-vous ?

— Oui, je comprends. Allez donc ! Laissemoi t’embrasser encore une fois, Moussia.

— Embrassez-vous ! Embrassez-vous ! dit le Tzigane. Vous êtes des femmes. Il faut bien se dire adieu.

Le tour de Moussia et du Tzigane arriva. La femme marchait avec précaution, d’un pas glissé et se retroussait par habitude. La soutenant d’une main forte et tâtant le terrain de son pied, l’homme l’accompagnait à la mort. Les lumières s’immohilisèrent. Autour de Tania tout redevint tranquille et solitaire. Les soldats, gris dans la lueur blafarde de l’aube, se taisaient.

— Je reste seule, dit Tania. Et elle soupira. Serge est mort, Werner et Wassili sont morts. Et Moussia meurt. Je suis seule. Soldats, mes petits soldats, vous voyez, je suis seule, seule…

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Le soleil se leva au-dessus de la mer.