Page:Andreïev - Les Sept Pendus (Trad. Serge Persky), 1911.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ceur déchirante. Tout en s’efforçant de parler, il pensait avec un frémissement :

« Mon Dieu ! Mais c’est une poupée ! Une poupée-mère ! Et voilà une poupée-soldat ; à la maison, il y a une poupée-père, et ceci, c’est la poupée Vassili Kachirine. »

Lorsque sa mère se mit à pleurer, Vassili retrouva en elle quelque chose d’humain, qui disparut aux premières paroles prononcées. Il regarda avec curiosité et frayeur les larmes couler des yeux de la poupée.

Quand la peur devint insupportable, Vassili Kachirine essaya de prier. Il ne lui restait qu’une rancœur amère, détestable et énervante de tous les principes religieux dont son adolescence avait été nourrie, dans la maison de son père, notable commerçant. Il n’avait pas la foi. Mais un jour, dans son enfance, il avait entendu quelques paroles qui l’avaient frappé par leur émotion vibrante et qui restèrent entourées à jamais d’une douce poésie. Ces paroles étaient :

« Joie de tous les affligés ! »

Parfois, aux minutes pénibles, il chucho-