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donc ? Et moi, où suis-je donc ? Moi… quel moi ? »

Il s’examina attentivement, avec intérêt, en commençant par ses larges pantoufles de prisonnier pour s’arrêter au ventre sur lequel pendait l’ample capote. Il se mit à aller et venir dans la cellule, les bras écartés, et continua à se regarder, comme le ferait une femme essayant une robe trop longue. Il voulut tourner la tête : elle tourna. Et ce qui lui paraissait un peu effrayant, c’était lui, Serge Golovine, qui bientôt ne serait plus !

Tout devint étrange.

Il essaya de marcher et il lui sembla bizarre de marcher. Il essaya de s’asseoir et il fut surpris de pouvoir le faire. Il essaya de boire de l’eau, il lui sembla bizarre de boire, d’avaler, de tenir le gobelet, de voir ses doigts, ses doigts qui tremblaient. Il se mit à tousser et pensa : « Comme c’est curieux ! je tousse. »

« Qu’ai-je donc, je deviens fou ? se demanda-t-il. Il ne manque plus que cela ! »

Il s’essuya le front et ce geste lui parut