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divine n’était figuré sans raison. Il est assis sur un trône et porte la couronne, parce que le prophète Isaïe avait écrit : Regnabit Deus tuus (Is., LII, 7), et parce que son père l’avait couronné de toute éternité Gloriâ et honore coronasti cum (Psalm., VIII, 6. Hebrae., II, 7). Posuisti in caput ejus coronam de lapide pretioso (Psalm., XX, i). C’est de cette royauté dont parlait J.-C. quand il répondait à Pilate, qui croyait pouvoir l’interroger : Tu dicis quia rex sum ego (Johan., XVIII, 37), et c’est à cette royauté que faisait allusion l’Apocalypse : Alleluia quoniam regnavit Dominus Deus noster omnipotens (Apocalyps., XIX, 6). Guillaume Durand, évêque de Mende, Ration, divin. offic., lib. I, cap. III, indique très-bien pourquoi le Christ est représenté couronné, et cite différents passages de l’Ancien-Testament qui ont donné naissance à ce symbolisme. M. Didron, dans son Iconogr., chrét., Histoire de Dieu, en a donné le texte en note, p. 295. Cette idée de la royauté de J.-C. se retrouve sur les monnaies d’or de nos rois, où on lit : XPC VINCIT. XPC REGNAT. XPC IMPERAT. Mais, comme l’avait en même temps dit J.-C., son royaume n’est pas de ce monde (Johan., XVIII, 36) ; et c’est ce qu’exprime le nimbe crucigère, attribut de Dieu et des saints de la Cour céleste, qui doit briller autour de sa tête. Si on ne l’aperçoit pas ici, c’est que ce nimbe était adhérent à la paroi de la châsse où était appliquée la tête qui devait en être entourée.

Le Seigneur est représenté pieds nus, parce que Dieu, les Anges et les Apôtres sont toujours ainsi figurés ; c’est un honneur que partage seul avec eux le précurseur saint Jean. Les pieds divins sont nus, selon la règle, pour montrer leur beauté évangélique, et parce qu’ils sont ceux d’une personne surnaturelle. On a déjà cité à l’occasion des Apôtres (no 644) les deux passages d’Isaïe, LII, 5, et de Nahum, I, 15, et dont fait l’application saint Paul, Rom., X, 15.

Il faut faire observer, sur la dextre bénissante de J.-C., que c’est la bénédiction latine qu’il donne aux fidèles, et non pas la bénédiction grecque. La bénédiction suivant le rite romain se donne le pouce, l’index et le médius étendus, les deux autres baissés et serrés contre la main, pour rappeler les trois personnes de la Sainte-Trinité. Les Grecs, au contraire, allongent l’index, courbent le médius, croisent le pouce sur l’annulaire et courbent le petit doigt, formant ainsi les quatre lettres de l’alphabet grec qui composent le monogramme du Christ ICXC (L’abbé Crosnier, Iconogr. chrét. dans le Bull. mon. de M. de Caumont, XIV, 1848, p. 85, 86. Didron, Icon. chrét., Hist. de Dieu, p. 207,212,415, 416). Si l’on fait cette observation, c’est que souvent des émaux du moyen âge ont été qualifiés à tort d’émaux byzantins, expression impropre lorsqu’elle vient désigner des figures qui, comme celle-ci, appartiennent évidemment au rite latin. La position des doigts dans la dextre bénissante est un indice certain pour distinguer les émaux de l’Eglise orientale de ceux de l’Eglise romaine.

Le livre que tient Jésus doit être encore l’objet d’une remarque. C’est Jésus considéré comme docteur, qui tient ouvert le livre de la loi. Les deux Testaments sont symbolisés par le livre de la science. Quand