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il allait écouter les oratorios de Bach. Berlioz et Liszt, « ce qu’on appelle la musique de l’avenir », lui paraissaient obscurs et artificiels. « Mozart et Haydn, Schubert et Mendelssohn, Beethoven et Bach, voilà les piliers sur lesquels nous nous appuyons, la musique allemande et moi[1]. » Et il faut noter cette assurance du moi, qui tout de suite prend ses racines jusqu’au tréfonds de la musique allemande.

Ainsi se prolongeait pour l’adolescent cette vie dans l’idylle. Quel danger se fût insinué par une vie si simple dans cette intelligence naïve ? Mais les dangers qui la menacent lui sont intérieurs. Il a décrit, en 1864, ceux qu’il discernait. L’absence d’une surveillance paternelle, une curiosité insatiable, qui risque de compromettre le travail solide. Il eut une impatience de savoir universel[2]. Pour l’instant, il s’ouvrait aux influences multiples et s’enrichissait. Il avait passé quelques années au gymnase de Naumburg, aux côtés de ses camarades Wilhelm Pinder et Gustav Krug. Mais sa tante Augusta Nietzsche étant morte, suivie de près par la grand’mère, ce fut le temps où une discipline plus rigoureuse fut imposée à l’esprit de Friedrich par son entrée à Schulpforta.


IV

pforta (1856-1864)


Pforta est une petite république scolaire unique de son espèce en Allemagne. Dans une vallée charmante entre Kœsen et Naumburg, de vieilles murailles enclo-

  1. E. Foerster, Biogr., I, p. 72.
  2. C’est peut-être à lui-même qu’il songe, quand il décrit ce trait chez Wagner (W., I, 503).