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CHAPITRE PREMIER

LE MILIEU HELVÉTIQUE


I

l’arrivée à bâle



Carl-Albrecht Bernoulli a décrit en artiste et en historien ce que fut pour Nietzsche, à son arrivée, cette ville de Bâle où il entrait, plein d’ardeur jeune et d’intime orgueil[1]. Nietzsche voyait la République bâloise en un temps de crise et de mue. Le grand travail de la démolition des remparts était comme symbolique. Les murailles jetées dans les fossés laissaient debout quelques grandes portes à tours en poivrière, comme ce Spalenthor près duquel Nietzsche allait habiter. La ville intérieure apparaissait dominée par sa haute cathédrale de grès rouge et par son hôtel de ville sang de bœuf enluminé de fresques. Le long des quais, de vieux hôtels étageaient sur le Rhin leurs balcons de riche ferronnerie du xviiie siècle. Le dédale intérieur des vieilles ruelles trop resserrées offrait nombre de maisons du temps de la Renaissance. Nietzsche sentit bien l’esprit de ce patriciat bourgeois (aristokratisches Pfahlbürgertum)[2], installé

  1. C.-A. Bernoulli, Franz Overbeck und Friedrich Nietzsche, t. I, p. 39 sq.
  2. Corr., III, 66.