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Tout à coup, je vis s’avancer une multitude de petites créatures charmantes, si petites qu’elles ne m’allaient que jusqu’au genou. Elles ressemblaient aux hommes ; mais elles étaient beaucoup mieux proportionnées. On les appelait Elfes. Leurs vêtements étaient formés de pétales de fleurs, garnis d’ailes de mouches et de moucherons en guise de dentelles. Elles avaient l’air de chercher je ne sais quoi; et plusieurs s’approchèrent tout près de moi. Soudain, celle qui paraissait être à leur tête désigna ma brochette en disant :

- Tenez, voilà précisément ce que nous cherchons! Il est. vraiment admirable !

Et elle était comme en extase devant mon bâton de voyage.

- Je veux bien vous le prêter, leur dis-je, mais il faudra me le rendre.

- Nous te le rendrons, me dirent toutes ensemble les petites créatures, et elles emportèrent le bâton pour le planter dans la verdure au milieu de la place. Elles aussi voulaient fêter le printemps et il fallait voir avec quel goût exquis ma brochette fut ornée.

De petites araignées la pavoisèrent en entier de ré- seaux vaporeux que faisait flotter gracieusement la brise du soir. Puis les Elfes prirent aux ailes des papillons leur poussière aux mille couleurs, et en parsemèrent la toile blanche et délicate qui parut alors toute brodée de fleurs et de pierreries. C’était un travail merveilleux et d’un éclat si resplendissant que mes yeux avaient peine à le supporter.

Je suis bien sûre qu’on n’a jamais vu, depuis que le monde est monde, une si magnifique brochette.