Page:Andersen - Nouveaux Contes, trad. Soldi.djvu/245

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

cabane, alluma un grand feu avec des branches sèches, écorcha l’animal et se mit en devoir de l’accommoder.

Mais une chose le contrariait dans son opération ; le foie surnageait toujours dans la marmite. Le paysan avait beau l’enfoncer avec sa cuiller, aussitôt lâché, le foie obstiné remontait à la surface. Notre homme finit par se fâcher ; il saisit le foie, le coupa en morceaux et le mangea presque cru.

Lorsque le repas fut servi, l’apôtre dit :

— Donne-moi un morceau de foie.

Le Normand, après avoir fait semblant de bien chercher dans la marmite, répondit :

— Il n’y en a pas.

— Qu’est-il donc devenu?

— Je ne sais ; c’était sans doute un agneau sans foie.

— Impossible, tout agneau a un foie.

— Et moi, reprit le payan, je vous jure, par tous les saints, que celui-ci n’en avait pas trace.

L’apôtre ne voulut point l’irriter davantage, et, jusqu’à la fin du repas, ni l’un ni l’autre ne dit plus rien.

Ayant continué leur route, ils arrivèrent encore entre deux villages dans lesquels les cloches sonnaient.

— Pourquoi sonne-t-on dans ces deux villages ? demanda de nouveau le paysan.

— Dans celui de droite, on sonne pour un enterrement; dans celui de gauche, pour un mariage.

— Bien! va à la noce; moi, j’irai à l’enterrement. Mais auparavant dis-moi, cher compagnon, comment t’y es-tu pris pour ressusciter le mort? (Il n’aurait pas été fâché de gagner aussi cent francs.)

— Voici, répondit l’apôtre : je lui ai imposé les