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proposition était trop tentante pour qu’il la refusât.

— Venez avec moi, poursuivit le marguillier, nous dînerons ensemble ; puis je vous donnerai les instructions dont vous aurez besoin pour vous acquitter comme il faut de votre rôle.

Tout le monde savait que M. le marguillier faisait une bonne cuisine ; aussi son invitation acheva-t-elle de décider maître Martin.

Le dîner se composait d’un excellent potage au riz, d’une énorme dinde truffée de marrons et d’une omelette aux confitures. Je laisse à penser si le savetier s’en donna à cœur joie. Quelques bouteilles de bon vin mirent le comble à sa béatitude, et ce ne fut pas sans un profond regret qu’il se décida à abandonner la table ; mais il fallait qu’il allât à l’église, avant qu’il y eût personne, afin d’y faire son apprentissage.

D’abord, on le revêtit d’un costume complet d’évêque, la chape au dos, la crosse à la main, la mitre en tête ; puis, le marguillier lui indiqua l’attitude qu’il devait prendre.

— Surtout, dit-il, ne faites pas le moindre mouvement ; autrement nous pourrions payer cher tous les deux notre petite supercherie. Essayez, maintenant ;montez sur le piédestal, levez la tête et prenez un air tout à la fois doux, majestueux et édifiant.

Le nouveau saint fit ce qu’on lui disait ; mais à peine s’était-il placé dans la niche, qu’il fit un bond et sauta en bas.

Une goutte de cire brûlante, provenant du lustre allumé au-dessus de sa tête, était tombée sur le bout de son nez.