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mérites beaucoup plus frappants et beaucoup plus rares. Ce qu’on peut établir comme une règle certaine, c’est que, si le livre destiné à vos enfants n’est pas lu avec autant d’intérêt par leurs parents et par leurs grands parents que par eux-mêmes, vous n’avez affaire qu’à une production éphémère et sans valeur.

Les contes d’Andersen s’adressent à tout le monde ; ils n’offrent pas seulement des tableaux pittoresques, des péripéties saisissantes, des personnages originaux ; ils ouvrent comme une source vive de pensées et de réflexions sur la vie et sur la destinée humaine. Le conteur peut nous conduire à travers les plus étranges labyrinthes de la fantaisie et de l’imagination. Nous sentons toujours le fil que le philosophe et l’observateur ont remis entre nos mains pour nous y diriger. Dès lors, ce qui nous rebuterait peut-être, si nous n’avions pas ce fil conducteur, nous enchante et nous ravit, et nous suivons sans résistance et avec plaisir le poète dans ses rêves splendides.

L’imagination du conteur danois, à dire vrai, est parfois vertigineuse. Une remarque que l’on a faite déjà et que nous pouvons répéter à son occasion, c’est que, par l’éclat et la hardiesse de l’invention poétique, les peuples du Nord rivalisent avec les peuples de l’Orient. Il n’y a pour lutter de merveilles avec le brûlant soleil de l’Inde, de la Perse et de l’Arabie, que la neige et la brume de l’Irlande, de la Norwége, de la Suède et du Danemark. Les extrêmes se touchent, dit-on : l’Edda rejoint les Vedas ; je ne sais rien de comparable aux Mille et une Nuits que les Mabinogion ou Nursery tales des anciens Gallois. Qui a le mieux traduit les magnificences de la poésie indienne dans un poème moderne ?