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laisse sortir du trou que tu vois là dans la muraille. Et puis voici mon favori, mon cher Beh ! » Elle tira d’un coin où il était attaché un jeune renne qui avait autour du cou un collier de cuivre bien poli : « Celui-là aussi il faut ne pas le perdre de vue, ou bien il prendrait la clef des champs. Tous les soirs je m’amuse à lui chatouiller le cou avec mon couteau affilé : il n’aime pas cela du tout. »

La petite cruelle prit en effet un long couteau dans une fente de la muraille et le promena sur le cou du renne. La pauvre bête, affolée de terreur, tirait sur sa corde, ruait, se débattait, à la grande joie de la petite brigande. Quand elle eut ri tout son soûl, elle se coucha, attirant Gerda auprès d’elle.

« Vas-tu garder ton couteau pendant que tu dormiras ? dit Gerda, regardant avec effroi la longue lame.

— Oui, répondit-elle, je couche toujours avec mon couteau. On ne sait pas ce qui peut arriver. Mais raconte-moi de nouveau ce que tu m’as dit du petit Kay et de tes aventures depuis que tu le cherches. » Gerda recommença son histoire. Les ramiers se mirent à roucouler dans leur cage ; les autres pigeons dormaient paisiblement.

La petite brigande s’endormit, tenant un bras autour du cou de Gerda et son couteau dans l’autre main. Bientôt elle ronfla. Mais Gerda ne pouvait fermer l’œil ; elle se voyait toujours entre la vie et la mort. Les brigands étaient assis autour du feu ; ils buvaient et chantaient. La vieille mégère dansait et faisait des cabrioles. Quel affreux spectacle pour la petite Gerda !

Voilà que tout à coup les ramiers se mirent à dire : « Cours, cours. Nous avons vu le petit Kay. Une poule blanche