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La corneille conduisit l’enfant dans le parc par la grande allée, et de même que les feuilles des arbres tombaient l’une après l’autre, de même, sur la façade du palais les lumières s’éteignirent l’une après l’autre. Lorsqu’il fit tout à fait sombre, la corneille mena Gerda à une porte basse qui était entre-bâillée.

Oh ! que le cœur de la fillette palpitait d’angoisse et de désir impatient ! Elle s’avançait dans l’ombre furtivement. Si on l’avait vue, on aurait supposé qu’elle allait commettre quelque méfait, et cependant elle n’avait d’autre intention que de s’assurer si le petit Kay était bien là. Elle n’en doutait presque plus ; le signalement donné par la corneille ne lui paraissait pas applicable à un autre. Les yeux vifs et intelligents, les beaux cheveux longs, la langue déliée et bien pendue, comme on dit, tout lui désignait le petit Kay. Elle le voyait déjà devant elle ; elle se le représentait lui souriant comme lorsqu’ils étaient assis côte à côte sous les rosiers de la mansarde.

« Comme il va se réjouir de me revoir ! pensait-elle. Comme il sera curieux d’apprendre le long chemin que j’ai fait à cause de lui ! Et qu’il sera touché de savoir la désolation qui a régné chez lui et chez nous, lorsqu’on ne l’a pas vu revenir ! »

Elles montèrent l’escalier. En haut se trouvait une petite lampe allumée sur un meuble. La corneille apprivoisée était sur le sol, sautillant et tournant coquettement la tête de côté et d’autre, Gerda, s’inclinant, lui fit une belle révérence, comme sa grand’mère lui avait appris à la faire.

« Ma fiancée m’a dit beaucoup de bien de vous, ma petite demoiselle, dit la corneille. Vos malheurs m’ont émue, et j’ai