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couragé, avait encore dans l’âme des cordes sensibles qui tout à coup résonnaient quand on venait à les toucher. Alors il parlait avec un enthousiasme communicatif. Sa voix vibrante, sonore et douce avait des accents enchanteurs, et une façon si distinguée et si gracieuse de prononcer certains mots, que ses séductions étaient irrésistibles. Sa tête, trop longue pour sa petite taille, avait une beauté noble et intelligente dont le charme était inexprimable ; on ne pouvait le voir sans deviner un homme supérieur, l’entendre sans être séduit par ses paroles.

On se demandera peut-être comment il se fit qu’il n’entraîna jamais la majorité à son avis lorsqu’il parla à la Chambre des pairs.

C’est que, sans doute, les hommes qui la composaient étaient presque tous armés contre lui de la crainte d’en être dominés. Sa supériorité les effrayait, ils se tenaient en garde et se révoltaient contre une personnalité rayonnante ; car, il faut le dire, Chateaubriand fut un des premiers fervents de ce culte moderne qu’on pourrait appeler l’adoration perpétuelle de soi-même, et qui a été la religion exaltée des écrivains de nos jours ;