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siciens, qui faisaient le fond de la société, étaient laissés à toutes leurs excentricités particulières, et remplissaient le salon de paroles vives et retentissantes. On chantait, on dansait, on jouait, on disait des vers. Tout cela était plein de vie ; madame Nodier était aimable de bonté. Sa fille unique l’était avec son esprit, qui tenait de celui de son père, avec ses talents agréables et avec ses quinze ans. C’était une existence qui s’épanouissait parée de mille enchantements. Peu de jeunes filles ont eu, autant que mademoiselle Marie Nodier, cette verve joyeuse qui semble dire : Je suis heureuse de vivre !

On s’amusait donc beaucoup chez Nodier, car une réunion s’empreint naturellement des dispositions d’esprit de la femme qui la préside, et la toute charmante fille de Nodier remplissait de joie le salon de son père ; elle y avait ses amies, comme elle à la fleur de l’âge. Des poëtes, des musiciens, des peintres aussi jeunes et joyeux, les faisaient danser, et tout cela était sous le charme de l’espérance ; la gloire leur apparaissait rayonnante, ils la voyaient de loin ! Et ce qui mettait le comble à l’insouciance, à l’enthousiasme et à l’exaltation,