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Il paraît pourtant qu’il avait eu réellement dans sa jeunesse la passion du jeu, et qu’elle lui avait causé de violentes émotions et de cruelles catastrophes ; mais sa vieillesse gardait l’apparence seule de ses goûts d’autrefois. Ses passions mortes avaient passé à l’état de fantômes avec lesquels il repoussait l’ennemi, c’est-à-dire ceux qui pouvaient lui nuire ou l’importuner.

Une jeunesse sincère, confiante, et par conséquent imprudente, donne tant de prise sur un homme ; il se voit tellement dupe de sa naïveté, qu’il apprend bientôt des ruses pour se défendre, et un art habile pour voiler sa pensée. Aussi ce ne fut point par la vérité que brillèrent les dernières paroles et les derniers écrits de Charles Nodier ! Mais on a tant menti de nos jours, qu’un peu d’altération du vrai doit obtenir grâce facilement quand cela ne fait tort à personne. D’ailleurs, les livres où Nodier l’altère sont les fruits de ces dernières années où la mémoire du vieillard peut errer dans les souvenirs du jeune homme. Il avait commencé par conter à ses amis, au coin du feu, avec une naïveté fine et charmante, une anecdote qu’il avait apprise, un conte qu’il inventait en par-