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Je fis connaissance d’une de ses vieilles amies, la marquise de Malaret, excellent type des marquises d’autrefois. C’était la sœur de la marquise de Polastron, cette chère affection d’un prince qui devait perdre si cruellement tous les biens que sa naissance et ses qualités lui avaient destinés. Le comte d’Artois, depuis Charles X, avait eu pour madame de Polastron un de ces sentiments commencés dans les illusions de la vie, mais qui, par leur force et leur sincérité, s’élèvent jusqu’à la pensée du ciel ; lors de la Révolution, vers 92, la marquise de Polastron suivit en Angleterre le comte d’Artois. Elle y mourut dans des idées religieuses aussi sincères que l’avait été son affection, et communiqua au prince ses convictions avant de remonter vers les cieux ; elle voulait emporter la certitude de l’y retrouver !

Le prince, à cette époque, était encore jeune et beau ; il promit, au lit de mort, une fidélité complète que le temps n’altérerait jamais. Il tint parole ; et, sur le trône comme dans l’exil, rien ne put le distraire de l’austérité d’une vie dont toute la poésie fut une ardente aspiration vers ce ciel où l’attendait la femme qu’il avait tant aimée.