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quelques rares exceptions. Ils peuvent, par exemple, entrer au service de l’État comme ingénieurs ; mais, en fait, presque aucun Juif judaîsant n’y parvient. Pour avoir quelque chance d’être admis, il leur faut commencer par se faire baptiser. Ils peuvent encore être médecins militaires ; mais les règlements ont eu soin de décider que les Juifs ne sauraient occuper plus de 5 pour 100 des postes de ce genre. Quant aux fonctions électives, rétribuées ou gratuites, la loi les écarte de presque toutes. Un Israélite ne peut être maire d’une ville ou ancien d’un village. Les Juifs ne peuvent jamais former qu’un dixième du jury et un tiers des conseils municipaux, même dans les villes où ils sont en majorité.

Les restrictions légales ou administratives les poursuivent jusque dans les carrières privées. On les a ainsi naguère fait expulser de tous les services des chemins de fer du Sud-Ouest. Un trait montre de quelle façon les autorités entendent les droits accordés aux Israélites. La loi reconnaît aux Juifs pourvus du diplôme de pharmacien le droit de résider dans tout l’empire ; l’administration de Pétersbourg n’en a pas moins fermé les pharmacies tenues par des Juifs. Elle a décidé que le droit d’habiter la capitale ne donnait pas au pharmacien celui d’y ouvrir une pharmacie. Cela est conforme à la jurisprudence habituelle en pareille matière. Vis-à-vis des Juifs, l’on s’inspire de maximes contraires au principe de toute législation : l’on considère que tout ce qui ne leur est pas formellement permis leur est défendu.

Autre exemple des restrictions imposées à leur activité. La loi garantit aux marchands de première guilde le libre séjour dans tout l’empire ; elle les assimile aux négociants de sang russe. L’administration ne leur en interdit pas moins tel ou tel commerce, telle ou telle industrie, C’est ainsi qu’elle leur a défendu le commerce des boissons et l’industrie de la distillerie en dehors de la zone d’habitation des Juifs. Un grand nombre d’Israélites de l’Ouest sont