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des tomes X, XIV et XV du volumineux recueil qui tient lieu de code (Svod zakonof). Tout enfant issu de parents orthodoxes est enchaîné à l’orthodoxie ; il en est de même de ceux qui naissent de mariages mixtes. Le mariage, en pareil cas, ne s’obtient qu’avec un engagement dans ce sens. Si certaines Églises d’Occident n’accordent la bénédiction nuptiale qu’à la même condition, la loi ne donne pas à ces exigences ecclésiastiques une sanction civile ; la conscience des époux reste libre de s’y soumettre ou de s’y refuser. Il en est autrement dans un pays où le mariage religieux est le seul légal, où l’inscription sur les registres de l’Église décide à jamais du culte. Ces règlements ont parfois donné lieu à des séquestrations d’enfants du genre de celle du juif Mortara, tant reprochée jadis au pape Pie IX. Indépendamment de la violence faite à la conscience, ces dispositions ont l’inconvénient d’entraver les unions entre les différents cultes, et, par suite, entre les diverses nationalités.

Un article du code interdit aux orthodoxes de changer de religion, un autre fixe les pénalités encourues pour ce genre de crime. Le fidèle enclin à sortir de l’orthodoxie est, d’abord, livre à l’exhortation paternelle du clergé paroissial, puis déféré au consistoire, de là au synode ; il peut être condamné à la pénitence ecclésiastique dans un couvent. L’apostasie entraîne la perte des droits civils. Le Russe qui abandonne la foi nationale devient inhabile à posséder ou à hériter. Ses proches peuvent s’emparer de ses biens ou le frustrer de son héritage. Le prosélytisme étant le privilège légal de l’Église officielle, il est interdit de s’opposer à l’exercice du monopole que lui confère la loi. C’est un délit d’engager à quitter la foi orthodoxe ; c’en est un de détourner de l’embrasser. Un Russe vient-il à déserter l’Église nationale, son père, sa mère, ses parents les plus proches sont tenus de le dénoncer. Il est prescrit aux autorités civiles et militaires de veiller à l’exécution de ces lois.