tions, par la police impériale. Comme au temps de Herzen
et de Kelsief, leurs oreilles sont demeurées sourdes aux
instigations des artisans de révolutions. A en croire certaines dépositions des procès d’Adrien Mikhaïlof et du
Dr Weimar, quelques « nihilistes » auraient renouvelé, auprès de ces rebelles de la conscience, les tentatives faites
un tiers de siècle plus tôt par les réfugiés de Londres. Les
Jéliabof et les Sophie Perovsky n’ont pas recruté un auxiliaire parmi ces raskolniks qui croient la Russie gouvernée
par l’Antéchrist[1]. S’ils sont révolutionnaires, ils le sont
d’une tout autre façon que les nihilistes sortis de « l’intelligence ». Il se peut qu’un jour les dissidents russes jouent
un rôle politique analogue à celui des non-conformistes
anglais ; mais ils sont encore loin d’y être préparés. Malgré
leurs rancunes contre les suppôts de l’enfer, le vieil esprit
russe les incline au culte du tsarisme. En anathématisant
l’empire, la plupart restent dévoués au tsar. Le souverain
le sait et se fie volontiers, à eux ; les cosaques de l’escorte
d’Alexandre II, le 1er mars, étaient presque tous vieux-croyants, et plusieurs ont été mutilés, un même fut tué
par les éclats de la bombe qui renversa l’empereur. Le
loyalisme du plus grand nombre des raskolniks est si peu
douteux que, durant la crise nihiliste, un homme, disparu
depuis, M. Tsitovitch, directeur du Bereg, avait imaginé
de chercher parmi les dissidents les éléments d’un tiers-état conservateur, à opposer à « l’intelligence » radicale.
Qu’a fait Alexandre III pour ces fidèles insoumis ? Les lois de mai 1883 et 1884 leur ont accordé des droits que le code russe leur avait jusque-là déniés. Pour la première fois, le législateur a reconnu aux vieux-ritualistes le droit de se réunir pour la prière et de célébrer l’office divin selon leurs rites. Les lois qui restreignaient les
- ↑ Je ne connais qu’un sectaire, réfugie à Genève, H. Korobof. le disciple d’A. Pouchkine ; qui se soit plus ou moins rallié au programme révolutionnaire et qui ait annoncé, au nom du ciel ; la déposition « des soi-disant Romanof ».