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cien Testament le pas sur le Nouveau. Les sabbatistes de Russie ont adopté certains rites juifs. y compris la circoncision. Ils attendent le Messie et croient que le règne d’Israël commencera l’an 7000 de la création. De même que les mormons, qui sont, eux aussi, à certains égards, des judéo-chrétiens revenus à la polygamie patriarcale, certains soubbotniki permettraient d’avoir plusieurs femmes à la fois, tout en se bornant d’ordinaire à une seule[1]. Ils observent les prescriptions bibliques sur les viandes pures et impures ; mais en cela ils ne font guère que se conformer à l’ancien usage de l’Église russe, qui a longtemps maintenu la prohibition de se nourrir de sang et de bêtes étouffées. Des sabbatistes du Caucase est sorti, vers 1860, un groupe d’ultra-judaïsants désignés sous le nom de Ghéry ; ils ont appelé un rabbin juif et remplacé dans leurs prières le russe par l’hébreu[2]. La Russie n’est point le seul pays chrétien où se soient montrés des sabbatistes ou sabbatariens. Il en existe aussi en Hongrie, en Transylvanie, et là, comme en Russie et dans l’ancienne Pologne, ils se sont trouvés en contact avec des israélites et des sociniens, des chrétiens unitaires. Si détestés ou méprisés qu’ils soient, les juifs n’en ont pas moins, par leur seul voisinage, inspiré des tentatives de synthèse religieuse, de réconciliation de l’ancienne et de la nouvelle loi. Dans ces dernières années, était encore enfermé au couvent de Solovetsk, sur une île de la mer Blanche, un vieillard du nom de Nicolas Iline, coupable d’avoir prêché, aux mineurs de l’Oural, un évangile qui, en dépouillant l’Église et la Synagogue de leurs dogmes et rites particuliers, les devait toutes deux réunir dans une nouvelle forme d’unitarisme[3].

  1. Étude sur les rationalistes russes, Vestnik Evropy, février 1881.
  2. Voyez Maksiniof. Za Kavkazom (Otetch. Zapiski, 1867).
  3. Sur ce personnage on peut voir un chapitre de M. Dixon, Free Russia 3e édit., 1er vol., p. 226, 244,